Qu’est-ce qu’une situation de survie ?
Lorsqu’on entend parler de situation de survie, on s’attend à une lente descente aux enfers, tiraillé par la faim, obsédé par la recherche de nourriture et traquant sans cesse le moindre petit gibier, une lance à la main, etc. Image largement véhiculée par les médias (tous supports confondus) et reprise par les concepteurs de matériel de « survie ».
Et pourtant ! En fait, notre corps répond à des lois physiologiques claires et identifiées depuis très longtemps. Pour tenter de s’en souvenir et poser les bons actes en situation de « survie », Ron Hood a établi qu’on survivait 3 heures sans abri, 3 jours sans boire et 3 semaines sans manger. Ce sont bien sûr des moyennes, mais cela permettait déjà de hiérarchiser un peu les besoins que l’on pouvait avoir en tant qu’être humain.
David Manise (Fondateur et Directeur Technique du Centre d’Étude et d’Enseignement aux Techniques de Survie) a, quant à lui, complété cette première règle pour y placer l’ensemble des besoins physiologiques.
Au final, on peut considérer que l’on survit :
3 secondes sans vigilance
Par exemple, je cherche une station 2 secondes sur l’autoradio à 130 km/h sur l’autoroute, je lève le nez pour avoir juste le temps de réaliser que je percute la rambarde de sécurité la seconde suivante. Cela signifie donc qu’il faut en permanence être conscient et informé de ce qui nous entoure, être « aware » comme dirait JCVD ;).
La plupart des accidents « cons » arrivent par inadvertance.
3 minutes sans dioxygène dans les centres vitaux
Autrement dit, il faut une respiration qui fonctionne, un système sanguin avec assez de pression pour que le sang circule dans tout le corps, le tout sans altération de la conscience.
Le brevet de premiers secours (PSC1) a sauvé et sauve encore des centaines de vies tous les jours. Formez-vous !
3 heures sans réguler sa température corporelle
C’est ce qui tue le plus de gens dans la nature, souvent en association avec autre chose (une hypothermie et une cheville cassée au beau milieu des Pyrénées par exemple).
La gestion de la température corporelle passe par énormément de choses comme respecter la physique de base (les façons dont on échange la chaleur avec notre environnement), la gestion des couches de vêtements, faire du feu, faire un abri, etc.
3 jours sans boire
Lorsque nous n’avons qu’une simple sensation de soif, nous sommes déjà déshydraté à 2%. Et 2% de déshydratation signifie que nous avons perdu 10% de nos capacités physiques et mentales. En situation de « survie », on ne peut pas se permettre de ne pas fonctionner de manière optimale. Nous avons besoin de toutes nos ressources intellectuelles et physiques pour poser les bons gestes, à commencer par respecter cette « check liste » ;).
3 semaines sans manger
Et parfois beaucoup plus ! Un homme d’environ 70 kg de taille moyenne contient environ 7 kg de gras (10%). À ces 7 kg on peut enlever environ 2 kg d’eau (30% d’eau dans la graisse), ce qui nous donne 5 kg de graisse à 9 kcal le gramme. Au final, après un rapide calcul, on se retrouve avec 45 000 kcal de stockées dans notre corps.
En prenant une base de 2000 kcal de consommées par jour, cela nous donne 22 jours !
Se nourrir, en situation de « survie », n’est donc pas une priorité ;).
3 mois sans hygiène
L’hygiène sur le terrain est primordiale, au risque de laisser survenir des petits désagréments qui rendent la vie infernale voire même empêchent toute action (la fameuse ampoule non soignée par exemple).
3 ans avec un boulot de merde
Certain(e)s y résistent mieux que d’autres ;).
Ainsi, chasser le cerf avec un arc réalisé avec le lacet de la rangers, n’est pas pour demain. Voilà qui est dit ;).
Nous venons de voir que notre corps avait des besoins physiologiques, hiérarchisés dans cette « check liste » qu’on appelle règle des 3 (je vous laisse deviner pourquoi).
Cependant, la nature étant bien faite, nous sommes dotés « d’outils » pour subvenir à nos besoins.
Ces outils, sont regroupés sous l’acronyme C²VMD et Ça, Ça Vaut Mille Dollars ;).
C pour « Conscience »
Nous sommes des êtres doués de réflexion et notre première arme est notre Cerveau ! Il est d’autant plus important de le garder en bon état de fonctionnement (petit rappel, on survit 3 minutes sans quoi déjà ?)
C pour « Communication »
Les militaires savent à quel point « garder la liaison » est important. Cela permet, tout simplement de s’organiser et collaborer.
En situation de « survie », savoir communiquer avec les sauveteurs (appel, signaux, etc.) permet de rentrer au plus vite au bercail.
V pour « Vision »
Tout le monde a déjà eu une poussière dans l’œil. Imaginez maintenant deux secondes que vous perdiez la vue.
M pour « Mobilité »
Si monter un abri et allumer son feu sont déjà deux choses complexes, qu’en serait-il avec un bras cassé ? Une cheville cassée ?
D pour « Dextérité »
Que celui qui ne s’est jamais énervé devant un nœud récalcitrant en plein hiver avec les doigts gourds me jette la première pierre !
Nos doigts et plus particulièrement la « pince » que forme notre pouce ont été une avancé majeure dans l’évolution de notre espèce.
Nous nous retrouvons ainsi avec des besoins physiologiques (Règle des 3) mais aussi des moyens pour y subvenir (C²VMD).
Une situation de survie c’est donc, par définition, lorsqu’un point de la règle des 3 ou du C²VMD est touché. C’est à ce moment là qu’il faut mettre tout en œuvre pour rétablir ces deux « check listes » fondamentales.
Cependant, cette capacité à agir dès les premiers instants est conditionnée par la volonté de survivre ou « l’attitude ».
Vous avez déjà vu un petit chat menacé ? Ou entendu des histoires de sangliers blessés qui foncent sur les chasseurs pour les éventrer ? Eux ont l’attitude. Ils ne lâcheront rien tant qu’ils ne seront pas tirés d’affaire.
Ainsi, comme Maslow, nous avons aussi notre pyramide qui remet un peu les choses à leur place quant à nos facultés à « survivre ».
En bas de la pyramide se trouve l’Attitude.
Sans cette volonté de ne rien lâcher, vous mourrez d’une mort lente et douloureuse ;). Attention, cela ne veut pas dire qu’on n’a pas le droit de pleurer, de hurler si cela permet derrière de poser les bons gestes. Et au quotidien cela se travaille, en ayant jamais la flemme de faire quelque chose notamment.
Au dessus se trouvent les connaissances et les compétences.
On l’a dit, notre premier outil est notre cerveau qui nous permet d’avoir des connaissances (je sais que si M.Dupont a une hémorragie, je dois appuyer dessus) qui, avec l’entraînement/l’expérience se transforment en compétences (je sais poser un pansement compressif sous stress).
Encore au dessus se trouve le physique.
Il permet de décupler votre attitude et vos connaissances/compétences, le physique étant à leur service. Pas besoin d’être un sur-homme mais pour marcher longtemps, courir un peu, sprinter, tirer son propre poids est un minimum.
Et enfin, au sommet se trouvent les outils.
Ils sont le prolongement de votre attitude, des vos connaissances/compétences et de votre physique. Autrement dit, m’acheter une trousse à outils Facom ne fera pas de moi un mécano. Avoir un bistouri dans les mains ne fera pas de moi un chirurgien. Cela relativise les tonnes de forums et sites internet regorgeant de matos « tactikeul » pour nous faire croire que nous sommes « des vrais ».
Tout ceci, n’est que du bon sens de base. Il n’y a pas de recette magique. Simplement des besoins physiologiques et des moyens d’y subvenir, le tout tout dicté par une volonté féroce de survivre.
Nous sommes le fruit d’une longue évolution où seuls nos ancêtres les plus résistants ont pu engendrer une descendance. Nous sommes donc des « machines à survivre » ayant pris le meilleur de nos ancêtres. Faisons-nous confiance.
Guillaume Mussard, moniteur de survie au CEETS (http://stages-survie-ceets.org/).

Philippe Ollioules
28/09/2013 at 07:06
Excellente intro avec un ton décalé par rapport à ce que l’on peut lire par ailleurs sur le sujet.
On a l’impression de se trouver dans la salle face au tableau blanc pour le briefing d’intro avant de partir sur le terrain pour le stage.
Petite suggestion : l’adresse du site du CEETS est mentionnée, mais un hyperlien serait sympa (ha oui l’attitude et la flemme….. Ok, ok, je fais un copier/collé…)
Bon courage pour la suite des articles !
Philippe Ollioules
19/10/2013 at 20:42
Alors Guillaume?
Un petit coup de mou ?
Y’a plus d’article sur la survie ?
Et Hugues faut réveiller les troupes ! Au TAF les gars !?!
(Pas de malaise, chacun son rythme, mais on prend goût aux bonnes choses….)
😉
Hugues
23/10/2013 at 17:47
Bonsoir Philippe ! Je transmets le message à Guillaume.
LTN Winters va reprendre du service, pour les autres c’est vrai qu’il y a quelques priorités persos ces derniers temps mais on va faire quelque chose !!
Des eBooks sont en programmation également ^^
En tout cas merci du soutien !! Ca motive !!
A la prochaine !